Renaissance...

Chap 1 et 2
jeudi 15 décembre 2022
par  Sylvain de Perry
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I

Silvio est troublé en sentant depuis un moment un regard qui pèse sur sa nuque. Il est monté à Siena dans le Regionale 18 236 de 18 h 18 qui devrait arriver à Firenze Santa Maria Novella à 19 h 52. Or ce regard a pesé plusieurs fois sur sa nuque depuis le départ.
Silvio décide d’en avoir le cœur net, se lève d’un bond avant la gare de Rifredi, tourne la tête, capte les yeux noirs qui se baissent au même moment. Le possesseur doit avoir au moins dix ans de plus que lui.
Silvio, vu que le train n’est pas excessivement rempli ce vendredi et qu’il y a un siège libre, avance dans la travée, s’assoit à la diagonale du garçon qui le regardait, le fixe sans bouger.
Son voisin de droite se lève juste avant l’arrêt du train en gare de Rifredi.
Leonardo ne sait plus quelle attitude adopter. Il avait repéré ce jeune garçon, vêtu d’un pantalon de cuir moulant, d’une veste en cuir aussi, dans la viale Sardegna qui mène à la gare de Siena.
Silvio n’hésite pas :
— On se connaît ?
Leonardo tête toujours baissée murmure en bégayant :
— N… non… je… je… ne… crois… pas…
— Si tu ne lèves pas la tête, tu ne pourras pas en être sûr.
Le visage de Leonardo devient rouge alors qu’il le relève.
Silvio ne fait rien pour rassurer l’interpellé, au contraire :
— Je te confirme : on ne se connaît pas.
Aucun des deux ne s’est rendu compte que le train s’est immobilisé au terminus, que le convoi est vide ou presque.
Silvio, toujours à l’aise, se lève :
— Viens-tu ou veux-tu retourner je ne sais où ?
Leonardo, penaud, se lève, suit le garçon qui s’éloigne. Silvio s’arrête, fait face à son suiveur :
— Ton sac à dos reste dans le train ?
— Euh… Merci !
Il manque de tomber en faisant demi-tour, récupère son sac qui était sur le siège voisin du sien.
Silvio, déjà sur le quai, le regarde descendre de la voiture en souriant, demande :
— Serait-ce moi qui te trouble à ce point ?
Si Leonardo avait été sûr de lui, il l’aurait rembarré. Mais voilà, il n’a aucune envie de le faire. Encore moins de lui avouer qu’il lui plaît. Silvio enfonce le clou :
— Si je te connaissais, je te conduirais dans les cabines douches au sous-sol de la gare, te donnerais une fessée sur ton cul nu pour cette inconvenance.
Leonardo a un hoquet, devient à nouveau rouge, immobile, a envie de fuir à toutes jambes, mais reste là.
Silvio devine plus ou moins ce qui se passe dans la tête du jeune homme, propose gentiment :
— Vu l’heure, si tu n’as pas una coincidenza à emprunter, on se dit au revoir ou on va prendre un boccone ensemble. Alors ?
Leonardo hésite : ce garçon lui plaît, certes, mais aller manger un morceau avec n’est-ce pas trop hâtif ? « Qu’est-ce que je risque ? ». Il retrouve un peu de voix :
— D’accord. Où allons-nous ?
— Acqua al Due connais-tu ?
— De nom seulement.
— À pied, on en a pour vingt minutes. Bon pour toi ?
- Perfetto.
Par tranquillité, sortant son portable, Silvio avise le patron Stefano de leur arrivée.

Depuis trente-cinq ans, Stefano et quelques associés veillent à la bonne marche de ce restaurant atypique dont le succès ne s’est jamais démenti. Les convives sont aussi bien des étrangers que des italiens.
Après avoir dégusté un succulent tris di primi, une salade de rucola, les deux garçons paient puis quittent l’ambiance feutrée. Ils ont parlé d’eux. Leonardo est un vrai toscan de Figline Valdarno ; Silvio est d’origine pugliese, Gallipoli.
Silvio propose :
— Si Vivoli est encore ouvert, que dirais-tu d’une glace avant de se quitter ?
Silvio fait comme s’il n’avait pas remarqué le tressaillement de Leonardo lorsqu’il a prononcé le dernier verbe.
Pour une fois, la réponse est rapide :
— Avec plaisir.
Ce glacier ferme à 20 h, mais depuis la Covid, il reste ouvert jusqu’à minuit les vendredis et samedi soir. Derrière son comptoir l’homme salue les deux garçons qui entrent :
— Ciao, Silvio !
— Ciao ! Pour moi una coppa cioccolato e limone ; lui, j’aurai fini avant que tu connaisses ses choix…
Les deux hommes rient, imités par la femme derrière sa caisse.
Silvio, pendant que l’homme le sert, murmure à l’oreille de Leonardo :
— Tu as dix secondes, sinon on réglera ça chez moi. Tu payes les glaces.
Leonardo rougit, oreilles incluses, bredouille après un temps :
— Chez… toi ? Mais…
— Vingt secondes. Perdu. Prends ton temps.
Leonardo reste muet puis choisit :
- Cioccolato e nocciola
Il se demande où cela va le mener, murmure à l’oreille de Silvio :
— Ça veut dire quoi ?
Un grand sourire, qui le rend irrésistible, éclaire le visage de Silvio :
— Ne sois pas impatient, mange ta glace, paye.
Sortis du négoce, les deux hommes enfilent la via Torta, tournent à gauche via dell’Anguillara ; à la troisième porte, Silvio engage une clef, pénètre dans le hall, Leonardo sur ses talons. Ils montent au second étage, porte à droite, entrent dans le trois pièces (en Italie la cuisine compte pour une pièce). LIRE LA SUITE


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