Chroniques

« Je me soumets à toi »
mardi 3 janvier 2012
par  sylvie
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1.

« Je me soumets à toi »

Cette seule ligne lentement calligraphiée. Pour te l’écrire, j’ai choisi cette plume de nacre que tu m’as offerte, cette encre un peu verte qui t’est réservée. Je relis cet aveu du désir, le regarde longuement, le répète à haute voix avant de replier cette grande page nue pour le surplus.

Résolution mûrie, il me faut te la confier, il me faut la savoir dans tes mains. Il est urgent qu’elle t’envahisse, qu’elle prenne possession de toi comme déjà elle est toute entière moi, qu’elle scelle ma liberté. J’aime l’aveu. Avant lui, il y a le choix et le libre arbitre. Plus qu à toi, Pierre, m’avouer à moi que c’est toi qui me délivre.

Il me faut te porter ce pli à cet instant même si je te sais absent. Je le glisserai sous ta porte, tu ne dois rien voir d’autre à ton retour que cet aveu nu. Tu ne dois rien savoir d’autre que la liberté d’user de moi que j’exige de toi.

La route est trop longue à mon impatience, mais je crois bien n’avoir jamais roulé si calmement pour venir à toi. Mon chemin est sans détour. Résolument. J’observe cet encore froid et timide printemps, le respire, l’invite à m’emporter. Il n’y a que des frissons dans le bourgeonnement. Ils sont le mystère des fleurs à venir. C’est là la patience et l’impatience. Ta lettre est posée sur le siège avant, je la retourne, je veux y lire son destinataire « Pierre ». Mes yeux se perdent entre la route et ton nom. Je te vois dans les arbres encore gris, je te reconnais dans les murs de pierres sèches que la chaleur ne réchauffe pas encore et ce lac dont la profondeur n’égale pas celle de nos secrets.

Devant ta porte, je sonne, pour rien, mais tu ouvres.

— Sibylle !

— Pierre…

Je bafouille. Je n’hésite pas. Je suis émue parce que tu es là, de chair, pour recevoir mon aveu. Je ne me reconnais pas moi-même et tu sembles douter. Ou craindre. Je ne me suis pas préparée pour te voir. Ce n’est pas mon manteau boutonné sur un cashmere confortable qui t’étonne, bien plus mes jambes que tu devines chaussées de bas doivent te tranquilliser quant à l’usage que tu peux faire de moi Mais bien plus cette soudaine timidité. Je me vois petite fille qui chanterait à Thanksgiving pour attendrir le Grand-Méchant-Loup en personne.
Je te tends ma lettre. Silencieuse, tu l’ouvres et parais inquiet, me regardes, interroges mon silence, la lis et la retournes. Te semble-t-elle trop courte, c’est moi qui deviens inquiète. Ton sourire me rassure, ta main sur mon bras affermit mon aveu. Je ne le répète pas, il est inscrit dans mon corps. Il tremble d’émotion, c’est son propre langage, sa sincérité au-delà de mes mots. Empoignée, prise, je passe le seuil et tu souffles à mon oreille « Bienvenue ».

Peut-être que j’espérais « enfin »

Il m’aurait dit que tu m’attendais depuis longtemps. Que je ne fais pas irruption dans ta vie. Tu en restes à ta « bienvenue » et me fait passer la porte. Je guette son claquement. Je l’espère qui se referme sur moi solennellement. Que ce bruit se distingue de sa fermeture ordinaire qui jusqu’ici anticipait et abritait nos ébats.

Ce bruit, je me l’étais figuré il y a bien des années. C’était bien avant de te connaître et je somnolais dans les bercements de la naïveté. J’avais franchi la porte du harem du palais du Topkapi et tentais, romantique de partager les larmes qui envahissaient celles qui l’avaient alors franchie et abandonner leur condition. A cet instant c’est bien à cette porte que je pense et sais si bien que depuis cette visite je n’ai cessé d’y penser. Ce sont de larmes que je m’étais figuré, je goûte à cet instant mon transport et ma liberté, je les guette, ne veux rien manquer de cette réjouissance. D’autant moins, d’autant plus, que cette porte se referme maintenant sur moi et par surprise. Pierre tu fais mon bonheur et ne le sais pas. Tu n’étais en principe pas là. Ce week-end m’appartenait encore, du moins je le croyais.

Enlève Sibylle qui ne m’appartient plus !

Prends donc ce qui est à toi ! LIRE LA SUITE


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Commentaires

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lundi 9 octobre 2023 à 08h01 - par  Henic

Quel dommage que ce récit ait reçu le numéro 1, qui indique qu’une suite est en préparation...
Ces trois pages sont joliment pleines d’abandon, de don de soi pour l’une, d’acceptation et d’accueil pour l’autre.

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mercredi 4 janvier 2012 à 16h43 - par  Le Mentor

J’aime ce début plein de promesses, j’espère que la suite cuivra bientôt et tiendra ses promesses ;-)

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mercredi 4 janvier 2012 à 04h14 - par  Bizber

Quel sublime abandon ! Quel don de soi ! Tout est amour et offrande dans votre texte magnifique
J’attends déjà la suite avec impatience
Merci

Bizber

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