Prises
par
popularité : 2%
Noël à Nairobi | 2 |
La traque | 6 |
Dans une rue étroite de Leblon | 8 |
Nairobi, au neuvième étage de l’immeuble de White Co | 13 |
Jazz à la Taverne de Joyce, à Boston | 15 |
Nairobi, immeuble de la White Co, 9e étage | 18 |
Une cachette dans l’ouest de Nairobi | 19 |
Nairobi, Immeuble White Co, Cave 10 | 22 |
Terreur à l’ouest de Nairobi | 25 |
Aéroport international de Nairobi | 26 |
Vente aux enchères dans l’ouest de Nairobi | 28 |
Au milieu de l’océan | 36 |
Bien loin… en Amérique du sud | 37 |
Au paradis | 38 |
Une ferme aux confins du Mato Grosso | 40 |
Dans la mer des Salomon | 49 |
Horreur au Mato Grosso | 55 |
Le thé au paradis | 61 |
A l’aube, au Mato Grosso | 65 |
Une cave dans la banlieue de Tokyo | 70 |
Sous les étoiles du Pacifique | 75 |
La nuit tombe sur le Mato Grosso | 81 |
La suite dans le tome 2 : « Le marché aux esclaves »
Traduit de l’anglais par Henic
Noël à Nairobi
Rachid arrête la voiture devant l’hôtel. Il n’a pas détaché son regard du rétroviseur pendant tout le trajet depuis l’aéroport. Sur le siège arrière, la plus magnifique des femmes blanches qu’il ait jamais vues se brossait artistiquement les cheveux en se regardant dans un petit miroir. En deux ans de travail comme chauffeur de taxi à Nairobi, la ville la plus cosmopolite de l’Afrique de l’est, jamais il n’avait vu une telle chevelure roux flamboyant ni de tels yeux vert émeraude.
Il sort rapidement de la voiture pour ouvrir la porte à sa passagère avant que le portier ait le temps d’y arriver. La jeune femme porte un pantalon bouffant en coton bleu à pois blancs, des chaussures de sport et une très courte chemise qui laisse à découvert sa taille mince, son nombril et un irrésistible ventre plat. Rachid inspire profondément sans la regarder lorsqu’elle passe, ces putains de femmes blanches sentent vraiment bon…
Un groom se précipite pour prendre ses bagages.
« T’as vu cette gonzesse ? Demande Rachid, submergé par l’émotion.
— Tu ne sais pas qui c’est ? Répond le groom. »
Le chauffeur de taxi secoue la tête sans quitter des yeux les hanches de la jeune femme.
« C’est Claudia Moore… le mannequin-vedette. L’hôtel est sens-dessus-dessous. Il y a un mois qu’on l’attend. »
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Claudia descend prendre le petit-déjeuner vêtue d’une robe rose toute simple à manches courtes, qui lui arrive juste au-dessus du genou, et de sandales ouvertes sans talons. A son arrivée, elle est tombée tout de suite endormie à cause du décalage horaire. Sur le chemin de la salle à manger, elle s’arrête à la réception et salue le concierge :
« Bonjour, je suis Claudia Moore. Avez-vous des messages pour moi ?
— Oui Mademoiselle ! Répond le concierge, visiblement nerveux. Ils ont appelé pour dire qu’ils passeraient vous prendre à dix heures. »
Claudia jette un œil à la pendule de l’hôtel. C’est bien : elle dispose de plus d’une heure pour prendre son petit-déjeuner. Elle prend un journal et se dirige vers la salle à manger, consciente d’être le point de mire de tous les regards. Elle en a l’habitude…
Pendant que le serveur lui verse son thé, elle analyse sa chance. Même si elle n’aime pas la ville pauvre et violente, elle va gagner au moins cent mille dollars pour trois semaines de tournage et elle aura sûrement la possibilité d’aller dans le parc national du Serengeti, dans la Tanzanie voisine, pour faire une pause… Voilà ce qui s’appelle un job ! Il y a un an qu’elle est mannequin, mais sa popularité s’est vraiment développée depuis cette nuit sur la plage avec le fils du Président et le scandale qui en a découlé.
« Excusez-moi, Mademoiselle. »
Le directeur de l’hôtel est impeccablement mis dans un costume du matin.
« Une voiture est là qui vous attend.
— Oh... Merci, pouvez-vous me donner l’heure ? Demande-t-elle, surprise.
— Il est dix heures, Mademoiselle. »
Claudia est déconcertée. Elle n’a pas l’impression qu’une heure s’est écoulée et elle pensait disposer de plus de temps. Elle sait ce que signifie la ponctualité dans le Tiers-Monde. Elle se dépêche de finir son thé et se lève sous les yeux attentifs des serveurs, lisse sa robe et quitte la salle à manger avec le directeur. A la réception, elle remarque que la pendule indique dix heures moins le quart mais elle ne dit rien. Un chauffeur à la tenue impeccable mais au regard déplaisant lui ouvre la porte de la limousine allongée qui l’attend.
« Bonjour, Mademoiselle Moore, la salue-t-il poliment. Nous devons faire vite, on nous attend, ajoute-t-il en lui découvrant ses dents jaunes et clairsemées. »
L’intérieur de la voiture est gigantesque ; une fenêtre à l’épreuve des balles sépare le chauffeur du « salon » où sont installés les passagers. Les fenêtres sont étamées, de telle façon que personne ne peut voir de l’extérieur. Claudia s’installe sur les confortables sièges en cuir et ouvre distraitement un magazine qui se trouve sur le bar. C’est dégoûtant… plein de photos de femmes nues attachées dans des postures indécentes. Rougissante et fâchée, elle lève les yeux et intercepte le regard du chauffeur qui la contemple dans le rétroviseur avec le même sourire sinistre qu’il arborait lorsqu’il l’a rencontrée. Claudia regarde ailleurs, vers l’extérieur. Il faudra qu’elle parle de cela à son agence…
Ils sont dans le centre de Nairobi, c’est la période de Noël et les gens font leurs courses. La voiture s’arrête à un feu. Le son métallique du haut-parleur interrompt ses pensées :
« Vous n’aimez pas le magazine, Mademoiselle ? »
Claudia serre les poings. L’homme est insolent ; il a évidemment fait exprès de laisser là ce magazine.
« Vous savez, continue l’inquiétante voix, je suis un de vos fans. Je vous ai vue dans des publicités à la télé… »
Le chauffeur sourit de nouveau dans le rétroviseur.
« Vous avez des nibards fantastiques… »
C’est est trop ; le porc la harcèle délibérément.
« Dommage qu’on ne les voie qu’une seconde… »
Le feu change de couleur et les voitures de derrière commencent à klaxonner. L’homme la regarde avec indifférence.
« Un ami m’a enregistré la pub mais la vidéo est pourrie et ça clignote sur pause… »
Toujours occupé à penser à la qualité de sa vidéo, il démarre tout à coup. Claudia ne peut se taire plus longtemps :
« Soyez aimable de vous concentrer sur votre conduite. J’informerai l’agence de vos manières. »
L’homme ne répond pas. Ils traversent une banlieue sinistre. Claudia, qui devient de plus en nerveuse, pense à sortir de la voiture mais cet environnement lui semble pire encore que l’impertinence de cette limace. Ils roulent encore une vingtaine de kilomètres en silence. Claudia n’a pas pris la peine de lire le script et elle ne sait pas où elle va tourner mais elle n’ose pas demander…
« Si vous ouvrez le magazine page quatorze, il y a une photo superbe. C’est ma préférée. »
Claudia est de plus en plus nerveuse. Ça devient vraiment déplaisant. Elle finit par demander :
« Où allons-nous ?
— A la planque, répond platement le chauffeur.
— Il doit y avoir une erreur… Balbutie nerveusement Claudia. On m’attend au studio, on fait des prises en intérieur aujourd’hui.
— Cette voiture ne va vers aucun studio, Mademoiselle, dit-il mystérieusement.
— Mais vous… ne travaillez pas pour Maisies & Maisies ?
— Non. Et ces gens ne sont probablement pas encore allés vous chercher. »
Le chauffeur s’interrompt pour allumer une cigarette.
« Je leur ai téléphoné pour leur dire que vous seriez en retard. Qu’ils viennent vous chercher plus tard, ajoute-t-il en expirant une grosse bouffée de fumée de cigarette. »
La voiture roule sur une route plate et poussiéreuse vers la réserve Masaï abandonnée.
« Ecoutez, expliquez-moi cela, voulez-vous !
— Patience, Mademoiselle. Nous avons deux jours rien que nous deux avant le transfert. »
La voix de l’homme est rauque et ses yeux brillants sont fixés sur le rétroviseur.
« On aura plein de temps pour bavarder…
— Arrêtez la voiture et ramenez-moi à l’hôtel ! Crie la jeune fille furieuse. »
Son fort tempérament a surmonté sa peur et elle est indignée.
« Tut, tut… Fait l’homme en secouant la tête. Vous avez trop de valeur… »
Un clic dans les haut-parleurs signale que le chauffeur a coupé l’interphone. Claudia crie et tape sur la vitre… rien. Elle tente de se calmer en respirant profondément. Elle n’y parvient pas. C’est sérieux. Elle regarde la vitre : le chauffeur se concentre exclusivement sur la route et conduit à toute allure. Il a mis des lunettes de soleil et se mord les lèvres en essayant d’éviter les nids de poules de la route. Derrière eux, un épais nuage de poussière empêche de voir quoi que ce soit. De chaque côté, la plaine désertique et poussiéreuse lui dit qu’ils sont tout proches du parc Serengeti. De temps en temps, il y a de petites installations Masaï délabrées. Des petits enfants vêtus en rouge ou en violet en sortent rapidement pour voir passer l’étrange véhicule.
Au milieu de la plaine désertique, la voiture ralentit au pied d’une colline. Un bus délabré et plein à craquer les empêche de passer. Claudia essaie de manœuvrer la poignée de la porte ; elle est verrouillée…
Au début de l’après-midi, ils quittent la piste maintenant presque invisible et s’engagent à travers la plaine. Au bout d’une heure, Claudia distingue une vieille construction à un étage. Puis la voix :
« Nous y somme presque. Je crois que c’est là. »
Claudia est déconcertée. Qu’est-ce que tout cela signifie ? Cet homme travaille pour quelqu’un, obéit à des ordres, mais de qui ? Que veut-il dire par « transfert » ? Pourquoi ce lieu isolé ? C’est évidemment un enlèvement mais à qui adressera-t-on une demande de rançon ? Qui, à part l’agence, est au courant de son arrivée à Nairobi ? Les seuls qui pourraient avoir un intérêt à payer seraient Maisies & Maisies. Tout son argent est à la banque et il serait risqué pour des ravisseurs d’aller le prendre après sa disparition… Tout à coup, elle se souvient du petit aérosol qu’elle a dans son sac… Elle l’ouvre et cache la petite fiole dans son poing fermé.
La voiture s’arrête devant le bâtiment délabré en pisé. Ça ressemble à une sorte de baraque de logement d’ouvriers abandonnée.
La chauffeur, qui paraît avoir la cinquantaine, sort de la voiture et se dirige vers la porte en boitant bas. Claudia le regarde… Il est de taille moyenne et sa tête est rasée. Il est quelque peu difforme avec de très petites jambes et pas de cou. De larges taches de sueur apparaissent sous ses bras et en bas de son dos.
Elle frissonne involontairement lorsqu’elle le voit se jeter sur la porte. Il la détruit complètement, d’abord avec des pierres puis en utilisant une poutre en bois qu’il arrache du toit avec ses mains nues. Ses actes sont brutaux et pleins d’une violence primitive.
L’homme disparaît dans la maison. Le brûlant soleil tropical commence à se faire sentir, maintenant que l’air conditionné est éteint. En quelques secondes, Claudia se met à transpirer, sous l’effet conjugué de la chaleur et de la tension induite par sa situation. Elle commence à se demander si tout cela n’est pas un terrible cauchemar.
Le chauffeur réapparaît quelques minutes plus tard et se dirige vers le coffre. Claudia ne peut détacher son regard de lui. Il claque le coffre et s’approche de la porte avec une paire de menottes à la main. Claudia serre les poings. Il ouvre la porte en disant :
« Allez, ma jolie, nous sommes arrivés. »
Claudia se réfugie à l’autre bout de la banquette. L’homme grogne…
« Alors la petite chatte veut jouer, c’est ça ? »
D’un geste étonnamment agile, il attrape sa cheville et la tire brutalement hors de la voiture. Claudia tombe par terre et sa main s’ouvre presque… Elle sent la lourde botte de l’homme appuyer sur sa poitrine.
« Nous allons être seuls ensemble pendant quelques jours. »
Tout en parlant, il appuie plus fort.
« Tu ferais mieux d’obéir et de ne pas créer de problèmes. En maintenant, dit-il dans un cri féroce, debout ! »
La fille se démène d’un côté et sa robe poussiéreuse se relève, dévoilant l’essentiel de ses cuisses bronzées. Claudia profite de cet instant pour vaporiser l’aérosol dans les yeux de l’homme. L’homme tombe par terre, les mains appuyées sur les yeux. Il halète et crache, en proie à d’énormes spasmes.
Claudia, surprise par l’effet obtenu, court vers la voiture mais les clés n’y sont pas. Résolument, elle saisit un morceau de bois du toit démoli de la maison et frappe l’homme à la tête jusqu’à ce qu’il tombe face contre terre. Elle fouille ses poches mais ne trouve pas les clés. Une poigne d’acier saisit sa cheville mais un coup de pied dans la figure la libère immédiatement.
Eperdue et nerveuse, elle se met à courir, à courir vers l’est, vers la route. Elle enlève ses chaussures mais les remet sans tarder. C’est plus confortable de courir avec des talons que pieds nus sur la plaine brûlante… Elle court encore et encore, le désespoir l’envahit de plus en plus. Des doutes l’assaillent. Elle s’est conduite stupidement ; elle aurait dû regarder si les clés n’étaient pas dans la maison, ou elle aurait dû rester sur place et frapper l’homme à mort… Elle court comme elle ne l’a encore jamais fait dans sa vie, poussée par la rage et la terreur. Si elle peut s’éloigner jusqu’à la tombée de la nuit, elle a peut-être une chance…
L’obscurité se fait et elle ralentit. Ses jambes lui font mal. Elle se retourne et distingue juste un nuage de poussière dans le ciel du soir. Elle s’arrête, tout essoufflée. Elle ne peut dire vers où se dirige la voiture parce que le vent pousse le nuage d’un côté. Elle se demande s’il vaut mieux s’allonger au sol ou continuer de courir. Elle reprend sa course… Lire la suite
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