Traditions d’Outre Manche
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Chez les Hooper
L’année dernière, j’ai été appelée à suivre un stage de deux semaines en Angleterre pour harmoniser les pratiques commerciales des filières anglaises et françaises de mon entreprise. J’étais la seule stagiaire issue de mon agence, et comme je suis par nature plutôt solitaire, je n’ai eu que des rapports professionnels avec mes collègues français. Par contre, au cours de divers échanges avec les équipes anglaises, je me suis rapprochée d’une collègue d’une agence britannique avec qui j’ai plusieurs fois partagé le repas de midi ou un café lors des pauses. Elle parlait assez bien le français pour que nous arrivions à nous comprendre dans un sabir qui mélangeait souvent les deux langues. J’étais logée dans un hôtel agréable mais où j’étais seule le soir dès les réunions terminées, et à part une séance de cinéma et une promenade dans une ville sans beaucoup de charme, je passais mes soirées seule devant la télé. Mary, ma collègue anglaise, a insisté pour que je passe le week-end chez elle, en affirmant que cela lui permettrait de pratiquer le français. Comme elle a vraiment insisté, j’ai fini par accepter, et j’ai donc fait la connaissance de son mari, un homme d’une cinquantaine d’années, d’un aspect « so british » avec ses cheveux blond roux et sa moustache de même couleur. Lui ne parlait que très peu le français, et Mary devait souvent faire l’interprète pour lui traduire nos conversations.
« Éducation anglaise » ?
Pour m’être agréable, Mary a branché son ordinateur sur la télévision française, et nous avons regardé ensemble les informations. Mary m’a taquiné à propos du débat qui enflammait alors l’actualité sur la possible interdiction de la fessée en France. En riant moi aussi de cette polémique un peu ridicule, j’ai lancé :
— Je comprends que cela fasse rire les Anglais, vous qui êtes tellement attachés aux traditions de « l’éducation anglaise ».
Mary ne connaissait pas cette expression, et je lui ai donc expliqué qu’à nos yeux de continentaux, les Anglais étaient restés fidèles aux châtiments corporels dans les écoles. Elle m’a démenti, en affirmant que c’était bien là un exemple des préjugés des « mangeurs de grenouilles ». Comme son mari, Ed, lui demandait ce qui nous faisait rire ainsi elle lui a expliqué et il a répondu en souriant :
— In England, spanking is not just for children, but for wives
Comme je n’avais pas compris sa phrase, je me suis tournée vers Mary pour qu’elle traduise, mais elle a haussé les épaules en disant avec une expression un peu exaspérée :
— Ed dit des bêtises
Et comme j’insistais pour ne pas avoir l’air de ne pas m’intéresser à ce que son mari voulait dire, celui-ci a repris en ponctuant ses mots d’un geste presque impératif du doigt :
— Translate, Mary, if not I flank you immediately a smacking !
Cette fois, j’avais bien entendu compris la première partie de la phrase, mais je demandais quand même à Mary :
— What does that mean ?
Mary semblait mal à l’aise, mais comme son mari l’invitait à répondre, elle finit par bredouiller :
— Smacking, ou spanking, en français je pense que vous dite « fessée » non ?
Je confirmais et c’est en m’adressant directement à Ed que je demandais, en me souvenant de sa première réponse :
— And is not for the children ? en ajoutant en français : finalement c’est peut-être vous qui allez nous pousser à abandonner cette pratique barbare
Je ne pense pas qu’Ed ait compris ma réponse, mais il répéta en souriant jusqu’aux oreilles :
— English reserve it to their wives
Une nouvelle fois, il me fallut interroger Mary, n’ayant pas compris le dernier mot. Et Mary, après avoir bougonné entre ses dents à l’intention de son mari, finit par bredouiller :
— Wives, c’est les femmes mariées, les épouses comme vous dites, je pense, voilà ! Tu vois qu’Ed dit des bêtises. LIRE LA SUITE
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