Sans mâle et sans tabou 4

Sandra et Salma
dimanche 5 novembre 2006
par  Nicky Gloria
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La soirée costumée du jeune et richissime Anthony Donovan est le premier grand événement mondain de cet été. Les moyens mis en œuvre pour s’amuser sont paraît—il impressionnants, et alimentent toutes les conversations, enflamment toutes les imaginations. Avec Anthony aux commandes on est certain d’en avoir pour son argent, de ne jamais être déçu. Il est le maître des nuits folles et branchées de la Côte d’Azur, l’heureux propriétaire de la boite de nuit la plus rentable de la Riviera. Gay extraverti, il sait exploiter mieux que quiconque les mots fête et démesure, spectacle et sens du délire. Il est une valeur sûre dans le milieu de la nuit, organisateur des soirées les plus réussies de la jet—set. Celle—ci est en effervescence, avide de gloire et de célébrité. La communauté homosexuelle, principalement concernée, est en émoi. Anthony fête ses vingt cinq ans. Et, fait exceptionnel, il reçoit chez lui. On dépense donc des fortunes en costumes, les gens usent de toute leur influence pour obtenir une invitation. Le soir de la réception, une foule nombreuse se presse, bourdonnante, curieuse, excentrique, mêlant tous les genres et toutes les époques dans des tenues aussi grotesques les unes que les autres. Le thème est libre, toutes les folies sont possibles. Pour faciliter la sécurité, deux agents d’une société privée sont postés devant l’immense portail en fer forgé, et un troisième, intraitable, ne laisse entrer que les personnes munies de leur carte d’invitation. Leurs consignes sont strictes, sans appel. Une allée éclairée se perd entre les pins parasols, et débouche dans un vaste jardin à la Française, rigoureusement entretenu, avec ses plates—bandes symétriques, ses haies de buis et son labyrinthe de charme taillés à la perfection. L’allée de gravier traverse cette impressionnante architecture végétale, passe sous une arche en charmille, et s’ouvre devant une imposante demeure de style américain, inspirée des modèles de Louisiane, avec une longue terrasse couverte qui court le long de la façade et d’épaisses colonnes. Devant l’entrée, alignés de chaque côté, de délicieux éphébes accueillent les invités d’un chant mélodieux, simplement vêtus d’un pagne. Ils ont été sélectionnés pour leur perfection physique, tous sont minces et légèrement musclés. Au—dessus de leur tête des lumières vives étincellent à chaque fenêtre, et une musique discrète se fait entendre, mêlée à des cris et des rires. La fête a commencé très tôt, et promet d’être mémorable. Anne Gayet est déjà présente, entourée de deux jeunes femmes qui semblent s’amuser de toutes ses facéties. Anne sourit, heureuse, gracieuse, observant tout ce qui se passe avec verve et ironie. Elle est vêtue simplement d’une longue robe de lin transparente, façon Egypte ancienne, qui révèle ses ravissantes formes dans un érotisme très suggestif. Un large collier dissimule à peine ses jolis seins. Une perruque noire, aux reflets outremer, met en valeur ses grands yeux bleus malicieux et la finesse de son visage enfantin, un visage qui allie ce qu’il y’ a de plus pur chez une femme, de noble et de délicat, que vient démentir sa tenue osée. Ce contraste ne la rend que plus touchante et troublante, femme—enfant au charme ambigu. Elle inspire d’emblée confiance, par sa fantaisie et sa franchise. Rien n’échappe à son regard, elle commente tour à tour avec beaucoup d’esprit l’arrivée triomphante de Napoléon, de Jeanne d’Arc, d’un chef gaulois et d’un viking, ou de personnages littéraires comme la gitane Esmeralda qui, cette dernière, est une magnifique métisse qui fait grande impression. Anne surprend son auditoire en dévoilant avec une facilité déconcertante certains secrets inavouables qui se dissimulent derrière toutes ces personnalités. Elle semble connaître presque tout le monde, et c’est avec cynisme qu’elle se moque gentiment, se divertissant de ce mélange folklorique et incongru, où chacun minaude et se pavane dans une agitation excessive. A mesure que les invités entrent dans le séjour, un drôle de majordome annonce leur nom d’une voix forte et solennelle. Il est habillé d’une façon assez maniérée, avec une chemise à poignets mousquetaires, un gilet de fantaisie aux couleurs fluorescentes et un nœud papillon à fleurs. La foule déjà en place applaudit à chaque fois, admirative devant les costumes ou impressionnée de reconnaître certaines personnalités importantes. Les invités traversent lentement tout le rez—de—chaussée, une vaste salle de 200 m.2 environ, pour atteindre ensuite une estrade de jade où, au milieu, sont royalement installés sur un trône d’ivoire les maîtres de la cérémonie. Là, les convives s’inclinent et font la révérence. Les paroles d’Anne deviennent plus acerbes lorsque, sur l’insistance de ses compagnes, elle s’attaque à leurs hôtes, un couple étrange, costumé de façon différente, dans un style aussi baroque qu’incohérent. Elle commence par l’homme :

— « …Vous pouvez constater qu’Anthony a une tenue de circonstance. Un empereur romain, Caligula sans doute, qui fut un empereur aussi décadent que débauché. Nous pouvons dire ici que l’habit fait le moine... »

Les deux femmes qui écoutent Anne pouffent de rire. Cette dernière continue dans sa lancée, parlant avec emphase, d’un ton précieux, imitant les manières raffinées de l’aristocratie très largement majoritaire dans cette foule colorée.

— « Entrer dans son univers c’est franchir une dimension complètement folle et démesurée. Anthony est un virtuose, c’est là une qualité qu’on ne peut lui retirer. Mais ses idées subversives lui donnent—elles le droit de propager une vision triste et éculée de l’autre monde, celui des hétérosexuels ? Voilà une question, chères amies, qu’il nous faudra débattre un jour. »

— « Et sa sœur, parle—nous d’elle ? C’est un drôle de numéro, celle—là. Dans le genre marginal, elle bat tous les records ! » intervient sa voisine de droite, une brune potelée déguisée en fée.

— « Sa demi—sœur » corrige Anne. « J’y viens… Je vous présente donc la championne toute catégorie du mauvais goût et de la provocation, celle qui défraie les journaux à sensations par ses frasques nocturnes, et tous les vices qu’on lui connaît ne sont que la partie visible de l’iceberg… Croyez—moi, mieux vaut en rester là. »

La brune potelée réagit encore :

— « Elle s’est faite dernièrement l’actrice Nicole Vivier. Les rumeurs précisent qu’elle n’a pas dit non très longtemps, et qu’elle y’ a vite pris goût. »

— « Nicole Vivier ! Tu rigoles ou quoi ! Elle est mariée avec l’un des plus gros promoteurs immobiliers de la Côte ! »

C’est son amie qui vient de s’étonner de la nouvelle. C’est une grande maigre aux cheveux teints en vert, assez jolie, les bras minces encombrés de lourds bracelets, le front cerné d’un bandeau serti de chaînes qui tombent des tempes jusqu’aux épaules, le cou surchargé de colliers métalliques qui s’entrechoquent, et tous ses apparats tintent joyeusement au moindre petit pas, au moindre hochement de tête, ce qui est le cas alors qu’elle s’agite avec scepticisme.

— « Et alors ? L’un n’empêche pas l’autre. Sandra sait y faire au lit, je n’ai jamais entendu de femmes se plaindre de ses méthodes, même si elles sont pas très catholiques ! C’est le résultat qui compte, on change pas une formule gagnante ! »

La femme aux cheveux verts regarde son amie d’un air soupçonneux :

— « Dis donc, me dis pas que tu as tenté l’expérience avec elle, ou cela en est fini de notre relation, et tout de suite ! »

— « Arrête, ne te mets pas des idées pareilles en tête, je ne t’ai jamais trahie ! C’est vrai, sur la tombe de ma mère ! »

— « Ta mère ! Tu te moques de moi ! Encore hier soir elle était à la maison, et elle nous a vidé tout le frigo ! »

Toutes deux se chamaillent tendrement sous le regard amusé de leur amie. La brune potelée se tourne enfin vers elle.

— « Excuse—nous de cette petite interruption, mais Stéphanie a le don de m’exaspérer. Tu en étais où déjà ? Ah, oui, Sandra et ses mœurs dépravées ! Hmm, tout un programme, j’adore ce genre de discussion… »

Anne grimace un sourire méprisant.

— « Arrêtez de fantasmer sur ses talents de lesbienne irrésistible. Sandra est juste une chienne en chaleur, mais contrairement aux animaux c’est chez elle un état permanent. Et pour Nicole, elle n’a aucun mérite de l’avoir dévergondée, avant il faut connaître les tenants et les aboutissants de l’histoire. Sachez donc que Nicole a enfin réalisé qu’elle était cocue depuis de longues années, que ses amis et sa belle— famille étaient au courant mais se gardaient bien de la prévenir, et c’est sans aucun doute par dépit qu’elle s’est laissée entraînée dans son lit. Voilà, Sandra était là bon endroit au bon moment, fin de la discussion. »

La grande femme aux cheveux verts ne semble pas d’accord.

— « Dis, si toutes les femmes déçues ou trompées par les hommes devaient se jeter dans les bras de la première femme venue, crois—moi qu’il n’y aurait plus beaucoup d’hétérosexuelles dans le monde. Je ne suis pas contre, mais je ne pense pas que ce soit le cas ici. Nicole a couché avec Sandra parce qu’elle en avait réellement envie, tout simplement. Et il faut cesser de baver sur son compte, t’es plutôt dure avec elle ! Elle traîne derrière elle une sale réputation, on dit les pires horreurs, mais ce n’est pas pour autant qu’il faut prendre tous ces ragots pour argent comptant. J’ai lu pas mal d’articles la concernant, et je peux vous dire qu’elle en a bavé. La vie ne lui a pas fait de cadeaux, je ne souhaite à personne d’endurer ce qu’elle a enduré. »

Anne lui jette un regard agacé. Son exaspération est aussi palpable qu’un orage sur le point d’éclater. Stéphanie est adorable, mais d’une bienveillance excessive, croyant toujours en la bonté de l’âme humaine, guidée par une incorrigible compassion qui lui fait partager les soucis et les peines de toutes personnes qu’elle rencontre, même les plus viles. En d’autres circonstances, c’est là une qualité qui l’honore, mais pas lorsqu’il s’agit d’un sujet aussi sensible que celui—ci. Par amitié, elle se contrôle, se contentant de prendre un air tout juste catastrophé.

— « Oh, la pauvre Sandra ! Elle a tabassé à mort la maîtresse de son mari à la sortie de son boulot, et a été inculpée de coups et blessures, mais ce n’est pas de sa faute ! On l’a arrêtée plusieurs fois pour conduite en état d’ivresse, excès de vitesse, exhibition sur la voie publique, consommation de drogue, et je dois en oublier certainement, mais elle n’y est toujours pour rien ! C’est une victime innocente de notre impitoyable société, pauvre petite fille riche, c’est vrai que ce n’est pas facile d’avoir des parents milliardaires ! » LIRE LA SUITE


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