Alice et Soldanelle

Chapitres XXI à XXIV
mercredi 31 mars 2021
par  lahoule
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— Dites-moi Lefranc, vous êtes sûre de votre coup avec cette garde à vue ?
—  Pourquoi, Monsieur le Principal ?
—  Simon Gourmaz fait partie des services généraux du contre-espionnage et n’est employé dans un laboratoire que comme couverture. Si on se trompe, c’est tous nos services qui trinquent.
—  Quoi ? Mais je l’ignorais, Chef. Cependant, je ne peux pas faire autrement. Soldanelle et moi, nous avons des indices plus que tangibles qu’il connaissait la victime…
—  Mais qu’il ait participé au meurtre éventuel…
—  Pour l’instant, nous n’avons que des présomptions que nous cherchons à vérifier. Chef, nous n’avons rien éventé jusqu’à maintenant, on peut bien encore attendre deux jours ?
—  D’accord pour deux jours, mais pas plus. Vous risquez gros, Alice, très gros.
—  C’était la première fois qu’il l’appelait par son prénom. Était-ce le signe qu’il était d’accord avec elle ? Soldanelle se chargerait sans doute de lui expliquer, elle, qui passait beaucoup de temps avec lui et qu’elle tutoyait également.
—  Bon, vous me l’interrogez, vite fait et le confrontez avec vos preuves. S’il était en mission, vous êtes cuites !
—  Impossible !
—  Impossible, impossible ! Il suffit qu’il prouve qu’il était en mission et vous êtes chocolat !
—  Je ne vois pas ce que le contre-espionnage pourrait bien avoir à enquêter dans le milieu SM !
—  Le milieu SM peut-être pas, mais qui vous dit qu’il n’infiltrait pas le milieu des laboratoires de pointe en matière de physique nucléaire, justement !
—  Peut-être, à la rigueur !
—  Allez, Alice, faites preuve de votre sagacité habituelle et liquidez-moi cette affaire, vite fait bien fait. Mais jouez en douceur et de façon discrète avec Gourmaz !
—  A vos ordres, chef ! J’y vais de ce pas !
—  Et assurez vos arrières dès l’instant où vous aurez des preuves !
—  Entendu, chef !
Il quitta le bureau d’Alice. Celle-ci prépara minutieusement les éléments du dossier permettant de confronter Gourmaz et les mit sous le bras pour sortir et aller dans le bureau de Soldanelle. Elle frappa, mais personne ne répondit. Pensant qu’elle faisait exprès, elle recommença sans plus de succès. Elle savait qu’Alice détestait rester ainsi plantée devant une porte et ce, d’autant plus lorsqu’elle se trouvait dans le commissariat. Elle piaffait depuis au moins une minute lorsqu’elle entendit Henri.
—  Voilà la plus belle, obligée d’attendre le bon vouloir de la tyrannique Soldanelle ! Pour une fois, ce n’est pas moi !
—  Henri… Je t’en prie !
—  C’est humiliant, hein, de battre le pavé devant une porte close ?
—  Elle n’est peut-être pas là…
—  M’étonnerait. Elle vient de prendre congé chez le Principal en disant qu’elle allait dans son bureau.
—  Comme un fait exprès, Soldanelle ouvrit à ce moment sa porte, découvrant Alice, confuse. Henri se délectait.
—  Oh ! Une double visite !
—  Non, non, je ne faisais que passer, mais j’ai aperçu cette pauvre Alice désespérée de ne pouvoir entrer.
—  Normal, je finissais un téléphone important. Entrez, Alice. A bientôt Henri !
—  A bientôt !
—  Elle ferma la porte et se dirigea à son bureau. Alice, déjà assise, commençait à déplier son dossier.
—  Je vois que tu oublies les convenances.
—  Comment ?
—  Je ne le répéterai pas deux fois !
—  Mais…
—  Debout !
—  On avait un accord, seulement en dehors du travail.
—  Debout !
Alice à contrecœur se leva et attendit. Soldanelle vint derrière elle, souffla légèrement dans sa nuque et lui susurra dans l’oreille.
—  Combien de fois devrai-je te rappeler que tu t’assieds après moi et quand je t’autorise ? C’est si difficile à comprendre ?
—  - …
—  Réponds !
—  Non, mais…
—  Mais ?
—  Quand je suis absorbée par le travail, les enquêtes, je n’ai pas la tête à ça !
—  Et bien, il faudra que je te l’apprenne. Elle la quitta et s’assit à son bureau.
—  Alors, revenons-y à notre enquête. Tu as amené tous les éléments ?
—  Oui. En confrontant les preuves que l’on a, les résultats ADN, on va pouvoir le questionner en profondeur. Ah ! Encore une chose. Le principal m’a confié que Gourmaz fait partie des services généraux et est infiltré dans un laboratoire concurrent, chez GB-la, comme couverture. Il se pourrait bien qu’il dénoue une affaire d’espionnage industriel. Peut-être que Carmen est tombée dans un piège.
—  Tu vas un peu vite en besogne. Tu crois vraiment que ce que l’on a trouvé chez Carmen la décrit comme une victime ? Non, je n’y crois pas une minute. La thèse de l’espionnage, pourquoi pas. Je crois plutôt qu’on a affaire à une femme sexuellement drôlement libérée et qui a des passions exigeantes. Elle a sans doute dans ce milieu trouvé des personnes partageant ses exigences, ça oui. Il me semble que l’espionnage est une chose et les pratiques sado-maso une autre. Nous allons interroger notre suspect et nous y verrons sans doute un peu plus clair. Tu mènes l’interrogatoire, je me contenterai d’intervenir en cas de besoin. Ça te va ?
—  Entendu ! Descendons dans la salle d’interrogatoire.
Les deux femmes quittèrent le bureau de Soldanelle, descendirent au sous-sol, à côté du laboratoire d’Henri.
Dans la salle, Simon Gourmaz, menotté, était déjà assis prêt à être entendu.
—  Monsieur Gourmaz, votre avocat va arriver d’une minute à l’autre. Désirez-vous l’attendre ou acceptez-vous que l’on commence déjà par les questions d’usage.
—  Faites comme il vous semble, c’est vous la police. Je me réserve cependant le droit de ne pas répondre aux questions qui requièrent mon avocat.
—  Entendu ! Monsieur Gourmaz, vous êtes bien né en 1973 à Nyon et demeurez temporairement à l’Exelsior, 23 bis chemin des Alouettes ?
—  En effet.
—  Vous faites profession de physicien et travaillez dans les laboratoires GB-lab spécialisés dans les matériaux d’isolation nucléaire ?
—  En effet !
—  Pouvez-vous nous indiquer comment vous vous êtes trouvé à être en relation avec madame Carmen Ruggieri ?
—  Ecoutez, ce que vous me demandez, c’est carrément de raconter ma vie, car je connais Carmen depuis notre enfance.
—  C’est-à-dire ?
—  Nous habitions dans le même quartier, avons fréquenté jusqu’au collège les mêmes classes. Nous nous sommes séparés au moment de l’adolescence, puisque je suis parti aux Etats-Unis avec ma famille et j’ai parfait ma formation là-bas. Cela a été pour nous deux une déchirure, car nous étions profondément amoureux l’un de l’autre. Je ne l’ai plus revue pendant quinze ans.
—  Donc vous mentiez lorsque vous disiez ne pas la connaître ?
—  Ecoutez, ce fut un épisode douloureux qui le reste chaque fois que j’en reparle.
—  Vous la connaissiez, l’avez-vous revue dans le cadre de votre activité professionnelle ?
—  Non !
—  Et dans un cadre plus privé ?
—  Non, plus !
—  Monsieur Gourmaz, reconnaissez-vous cette jaquette ?
—  Oui, en effet, c’est la mienne. Vous l’avez prise chez moi.
—  En effet. Avez-vous remarqué quelque chose de particulier à cette jaquette ?
—  Pas spécialement, je la mets de temps en temps en automne par-dessus un tee-shirt.
—  Saviez-vous qu’elle a un accro ?
—  Non, pas du tout.
—  Observez attentivement le bas de la jaquette.
—  Il y manque un bouton et alors ?
—  Pas seulement, Monsieur Gourmaz ! Un bouton et un morceau du tissu.
—  Je ne vois pas où vous voulez en venir.
—  Observez ce morceau de tissu et ce bouton.
—  A l’évidence, c’est le morceau manquant à ma jaquette. Où l’avez-vous trouvé ? Chez moi ?
—  Non, Monsieur Gourmaz ! Nous l’avons trouvé chez Carmen Ruggieri !
Alice fut interrompue par quelqu’un qui frappait à la porte. Soldanelle se leva, ouvrit et laissa entrer une splendide jeune femme vêtue d’un tailleur que n’aurait pas renié Soldanelle.
—  Je suis Annabelle Aubert, avocate de Monsieur Gourmaz. J’ai été retardée au tribunal.
—  J’espère que vous n’avez pas posé des questions embarrassantes à mon client.
—  Le ton hautain avec lequel elle parlait eut le don d’agacer Alice qui répliqua de suite.
—  Maître Aubert, soyez assurée que nous ne nous serions pas permis de tels agissements. Nous en étions uniquement restés à des questions d’ordre général, mais votre arrivée va nous permettre de poursuivre avec plus de détails.
—  Faites ! fit l’avocate qui avait senti l’humeur grinçante d’Alice.
—  Donc, Monsieur Gourmaz, vous reconnaissez ce morceau de tissu et ce bouton comme faisant partie de la veste qui vous appartient.
—  En effet. Et je vous ai demandé où vous les aviez trouvés ?
—  Et bien, sachez que ce tissu et ce bouton ont été trouvés au domicile de madame Carmen Ruggieri, que vous disiez ne pas connaître, alors que vous étiez des amis d’étude…
—  L’avocate coupa tout de suite la suite des questions.
—  Je vous en prie, inspecteur, mon client n’a encore rien dit que vous l’accusez de mensonge !
—  Madame, je relève simplement que votre client nous a assuré ne pas connaître madame Ruggieri, dans un premier temps, qu’il s’est ravisé par la suite en nous disant qu’il l’avait connue dans sa jeunesse. Qu’il ne l’a plus revue ensuite ! Comment se fait-il alors qu’un morceau de sa veste soit retrouvé chez elle, s’ils ne se sont pas revus ? Il n’y est pas arrivé tout seul.
—  En effet, je l’ai vue dernièrement.
—  A quelle occasion ?
—  Vous savez sans doute que GB-lab est en concurrence avec Xsylon et c’est tout par hasard lors de pourparlers que j’ai eu l’occasion de la revoir. Vous vous rendez bien compte que ce n’était pas une situation aisée, ni pour elle ni pour moi. Je ne pouvais indiquer à qui que ce soit que nous nous connaissions pour éviter que les projecteurs soient focalisés sur nous dans ce différend. Nous en avons parlé ensuite au restaurant d’abord, puis chez elle. Mais il ne s’est rien passé entre nous.
—  A cette occasion, certes, parce que les photos prises à la Souricière à deux reprises démontrent le contraire et surtout elles nous éclairent sur la nature de vos rapports qui sont loin de rapports de travail, si je puis dire !
Alice accompagna sa remarque d’un geste un peu calculé, certes, mais qu’elle aimait en posant sur la table une série de quatre photos, un peu comme un joueur de poker qui abat son jeu.
—  Inspecteur ! Mon client est toujours présumé innocent et il me semble que les sous-entendus que vous lâchez sont de nature à laisser penser le contraire.
—  Maître Aubert, je pense que les photos que voici démontrent que Monsieur Gourmaz n’a pas, en l’occurrence, que des rapports de travail, ni de simple amitié, scolaire, rappel du passé. Il est en situation claire d’ébats sexuels à caractère sadomasochiste.
La jeune avocate prit les photos et les examina attentivement. Elle réfléchit plusieurs minutes avant de lâcher :
—  Et qu’est-ce qui vous permet de prétendre que la personne féminine en position, disons délicate est bien la victime ? Je reconnais bien mon client, mais la femme dans cette position avec la tête en bas pourrait tout autant être vous ou moi !
—  Ecoutez, Maître, je vous laisse la responsabilité de vos propos ambigus. Sachez tout de même que nous n’avons aucun doute sur l’identité de la femme attachée et suspendue. C’est bien Carmen Ruggieri et l’homme est clairement reconnaissable. Ils sont loin de jouer à Roméo et Juliette !
—  J’apprécie votre humour décapant, inspecteur, mais il me semble quelque peu déplacé en cette occasion. Vous accusez mon client sur la base d’un document sur lequel on peut difficilement reconnaître l’une des protagonistes.
—  Peut-être que celle-ci sera plus démonstrative !
L’avocate resta interloquée par l’image crue où l’on distinguait très nettement Gourmaz enfonçant son sexe dans la bouche de sa victime, pendant que derrière, on apercevait un homme les deux mains accrochées à sa taille planter son sexe tendu entre ses fesses. Sur la photo, Carmen était parfaitement reconnaissable et témoignait d’un plaisir sexuel évident. Par ailleurs ou distinguait le tatouage d’un gecko sur la fesse gauche luisant à cause de la sueur.
—  Je pense que cette photo est suffisamment révélatrice, Maître Aubert. Nous allons donc poursuivre si vous le voulez bien, à moins que vous désiriez ajouter un commentaire.LIRE LA SUITE




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