2 - Drôle de couple

Sa première fois
lundi 29 janvier 2007
par  Irène
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Café noir et pain au chocolat pour monsieur, le journal feuilleté à la va-vite... Rien, au petit-déjeuner, ne laisserait deviner que la nuit a été blanche et rude. Mais quand, profitant que les garçons sont partis préparer leurs affaires, j’annonce, d’une voix calme, que je n’irai pas travailler et que je vais chez ma cousine, à Marseille, pour le week-end, Julien me regarde, la mine décomposée :

— Tu veux partir ?

— Oui, je viens de te le dire. Chez Marion, pour le week-end

— Mais tu reviens...

Il a des airs de chien battu que je ne lui connaissais pas. Visiblement, il a peur. Comme si je venais de lui annoncer qu’il n’a plus qu’à téléphoner à son avocat pour préparer le divorce. J’ai du mal à réprimer le plaisir que j’éprouve à me sentir forte alors qu’il perd, lui, toute assurance. Mais la compassion l’emporte :

— Bien sûr, je reviens. Il y a deux gosses, ici. Ils seront d’ailleurs ravis que leur père s’occupe d’eux pendant deux jours. Et toi, ça te changera peut-être les idées...

Aussi penaud que soulagé, il se lève, appelle les enfants et file les déposer à l’école avant de gagner le bureau.

Il a à peine claqué la porte que je m’effondre en larmes. Le trop-plein qui se déverse d’un seul coup. Rester digne et calme, maîtresse de mes nerfs, une nuit durant, à l’écouter me raconter ses histoires m’a totalement épuisée. Je suis à bout et les larmes me font du bien. L’idée de me réfugier chez Marion m’est venue comme une évidence, en préparant le café. Pour éviter un face à face mortel pendant le week-end. Et pour pouvoir parler à mon tour, vider mon sac en étant sûre d’être écoutée.

Marion a six mois de plus que moi. On a grandi ensemble dans notre Normandie natale et, comme deux sœurs, on n’a jamais cessé de se raconter notre vie.

J’ai acheté « Elle » avant de monter dans le TGV mais ce défilé de mannequins, toutes plus minces et plus belles les unes que les autres, m’a donné le bourdon. J’ai refermé, incliné le dossier et je me suis mise à regarder filer la campagne à 300km/heure. Marion a été géniale, comme d’habitude. Pas de questions superflues. A ma voix, elle a tout de suite compris que c’était pas le beau fixe et a sauté de joie quand je lui ai dit que je débarquais après le déjeuner.

Plus expansive que moi, elle a toujours, aussi, été plus plus audacieuse et plus portée sur la « chose ». Premiers flirts à douze ans alors que je jouais encore à la marelle (enfin, presque...) et déjà plus vierge à quinze, trois ans avant moi ! Bohème et un peu artiste, elle est devenue prof de dessin et s’est assagie quand elle a rencontré Benoît, l’homme de sa vie. Photographe professionnel, il aurait aimé faire de vraies photos d’art, mais se contente de travailler pour les catalogues d’entreprises et fait, le samedi, la porte des mairies et des églises pour immortaliser le bonheur des jeunes mariés.

« Le bonheur des jeunes mariés » ! L’image m’est revenue en coup de vent. C’était pas mal ce jour-là, c’était même bien. Julien, engoncé dans son costume Armani, moi dans mes taffetas et dentelles... Qu’aurais-je fait si j’avais su ? Si j’avais su que derrière son beau sourire, le bel homme viril qui me bisoutait à la demande générale des amateurs de clichés tendres, jouait déjà les toutous servils aux pieds de dames en cuir grassement rétribuées...

Comment ai-je pu être aussi naïve, attribuer son manque d’empressement à la fatigue, au stress, à tel ou tel blocage, et que sais-je encore ?

En regardant la campagne défiler, je ressasse les mêmes questions, me fais les mêmes reproches. Je n’ai peut-être pas la « santé » de Marion, mais je ne suis plus une oie blanche, tout de même ! Les amis-amants d’avant le mariage m’ont gentiment décoincée et je suis arrivée dans le lit conjugal avec ce qu’il faut pour pimenter la vie. Mais non ! Panne sèche ou presque. Jusqu’à me surprendre, régulièrement, sous la douche, à titiller de mes doigts ce que monsieur avait oublié de visiter avec l’engin ad-hoc !

Dire qu’il aura fallu dix ans pour percer le secret. Et me retrouver un beau matin avec une « petite salope » qui supplie « Maîtresse » de lui « dilater le trou » ! Malgré tous mes efforts, je n’arrive pas encore à réaliser. Sûr, même Marion ne pourra pas y croire...

Allez donc imaginer, de but en blanc, que l’homme avec qui vous faites papa-maman depuis des années, s’est toujours senti, comme il dit, des « penchants et des besoins différents » ? C’est quand même pas écrit sur son front qu’à quinze ans il s’enfermait dans la salle de bains pour enfiler la petite gaine et les bas de madame-mère, retrouvés dans le panier de linge sale. Et qu’en haut, il roulait des gants éponge pour garnir les bonnets du soutien-gorge. Pas visible à son nez que, des années durant, il a arpenté la rue Saint-Denis, un tube à cigare enfoncé dans les fesses, pour regarder les femmes monter, un homme collé à leurs basques, et imaginer ce qui se passait dans la chambre dont la fenêtre venait de s’allumer...

J’ai beau avoir les yeux bien ouverts et rivés au dehors, ce n’est pas la campagne bourguignonne que je vois mais des trottoirs humides, des hôtels borgnes, des chambres miteuses. Et mon Julien, qui zone en serrant les fesses sur son cigare, la queue dressée dans le pantalon, se passant et repassant le film des étreintes en tous genres qui déroulent là, juste au-dessus de lui.

Combien de temps a-t-il parlé ? Cinq heures ? Six heures ? Reprenant sans que je ne lui demande rien quand le silence devenait trop pesant. J’ai écouté sans bouger, sans ciller, allongée comme une momie. Il ne me regardait pas, gardait les yeux scotchés au plafond, et parlait, parlait...

J’ai tout écouté, sans perdre un souffle, une hésitation, un murmure.

Il a raconté l’adolescence, ses premiers émois dans les dessous blancs de maman, les journées entières avec les petites culottes de soie ou de dentelle chipées dans la commode de sa grande sœur.

Il a dit sa peur des filles, la certitude de ne pas séduire, l’attrait de la pornographie et les masturbations, de plus en plus fréquentes.

Puis les trottoirs des quartiers chauds, le besoin grandissant de voir les prostituées, l’excitation devant les jarretelles dévoilées, les fourrures entrouvertes sur un pubis à peine voilé, les décolletés indécents, les gros seins vus en transparence.

Et il y eu la première fois... LIRE LA SUITE



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